Anne de Bretagne

Yves COATIVY Historien médiéviste, professeur d'Histoire à UBO

Photo d'après Le Télégramme

Anne de Bretagne

Anne de Bretagne, née le 25 janvier 1477 à Nantes et morte le 9 janvier 1514 (à 36 ans) à Blois, est duchesse de Bretagne et comtesse de Montfort (1488-1514) et d'Étampes (1512-1514) et, par ses mariages, archiduchesse consort d'Autriche, reine consort de Germanie (1490-1491), puis de France (1491-1498), puis de nouveau reine consort de France (1499-1514) et de Naples (1501-1503) et duchesse consort de Milan (1499-1500) et (1500-1512).

Elle était la fille de François II (1435-1488), duc de Bretagne, et de sa seconde épouse Marguerite de Foix (v. 1449-1486), princesse de Navarre.

Elle est un enjeu central dans les luttes d’influence qui aboutiront après sa mort à l’union de la Bretagne à la France. Elle a également été élevée dans la mémoire bretonne en un personnage soucieux de défendre le duché face à l'appétit de ses voisins

Portrait d'Anne de Bretagne.

Anne de Bretagne, duchesse de Bretagne et deux fois reine de France

» Le 26 juin 1471, François, duc de Bretagne, épouse Marguerite de Foix. Le 25 janvier 1476 (ancien style, mais en fait 1477 après l’unification du calendrier), naîtra leur première fille, Anne.

Anne grandit dans la Tour Neuve du château des ducs de Bretagne à Nantes. Son éducation fut confiée à Françoise de Dinan, fort savante et versée dans les lettres et les arts.

 

Anne apprendra le français, le breton, le latin et le grec et même un peu d’hébreux. Elle chante, danse, joue de la musique, peint et brode. Ses contemporains la décrivent comme une enfant à l’esprit net, au sens droit, une princesse accomplie, à l’intelligence ouverte, et qui est aussi très généreuse mais n’oublie ni les injustices, ni les offenses.

 

Au physique, petite, légèrement boiteuse, ce n’était pas une beauté mais elle avait beaucoup de charme, et un air de noblesse, de bonté et de décision se dégageait de sa personne.

 

Son enfance eut été des plus heureuses si le duché de Bretagne n’avait été menacé en permanence par le royaume de France et son roi, le fourbe et cruel Louis XI, aux exactions innombrables.

 

Pour protéger le duché et son héritière, François II signe un traité d’alliance avec Edouard IV d’Angleterre qui s’engage à marier son fils, le prince de Galles, avec Anne quand ils seront d’âge.

 

Louis XI est mort en août 1483 mais sa fille Anne de Beaujeu, régente du royaume, continue sa politique belliqueuse et, grâce à ses mercenaires, l’armée royale infligera à l’armée ducale une sangl- ante défaite à Saint-Aubin du Cormier le 28 juillet 1488.

 

Désespéré, le duc meut en son manoir de Cazoire à Couëron le 9 septembre suivant.

 

La Bretagne est occupée par les soudards du roi de France. Malgré son jeune âge, Anne comprend qu’elle doit se marier pour échapper au tyran français. Parmi les sept prétendants possibles ses conseillers choisissent Maximilien, duc d’Autriche et héritier de l’Empire.

 

Entre temps, Anne aura été couronnée duchesse de Bretagne en février 1489 à Rennes, comme le veut la tradition. Et c’est le 19 décembre 1490 qu’Anne épouse Maximilien à Rennes lors d’une cérémonie pour laquelle le duc d’Autriche s’est fait représenter par Wolfgang de Polham, suivie d’une messe dans la cathédrale célébrée par Mgr Michel Guilbé.

 

Mais le chef de guerre poitevin La Trémoille au nom du nouveau roi de France, Charles VIII, met le siège devant Rennes avec ses soudards en octobre 1491. Mais Rennes résiste. Le roi y vient en personne et propose à Anne de l’épouser. Les conseillers de la duchesse la pressent d’accepter pour le bien de son peuple, ce qu’elle fera finalement. Le mariage avec Maximilien étant déclaré nul car non consommé, le mariage avec Charles VII de France, ce bravache fauteur de guerre qui mit l’Italie à feu et à sang, aura lieu à Langeais loin de la Bretagne et dans un quasi secret le 6 décembre 1491, entouré d’un fort parfum de rapt ce qui amènera le pape Alexandre VI à n’accorder sa dispense qu’après une déclaration solennelle d’Anne affirmant qu’elle n’avait été l’objet d’aucune violence.

 

Anne, encore une enfant, elle n’a que 14 ans, s’installe  à la cour de France qui est sans doute pour elle, tellement attachée à sa Bretagne, une prison.

 

Son premier fils, Charles Orland, meurt en décembre 1495 de la variole. Elle aura trois autres enfants, Charles, François et Anne, qui meurent tous peu de temps après leur naissance en 1496, 1497, 1498.

 

Et cette même année 1498, le sort la débarrasse de Charles VIII qui se tue dans un banal accident.

 

Elle profite de sa liberté retrouvée pour rétablir les droits de son duché et obtient du nouveau roi Louis d’Orléans-Valois, qui avait combattu aux côtés des troupes bretonnes à Saint-Aubin du Cormier, le retrait des troupes d’occupation françaises en Bretagne.

 

Devenu Louis XII de France, il doit répudier son épouse Jeanne de France, une femme disgraciée que son père Louis XI avait forcé le duc à épouser pour qu’il ne puisse s’assurer une succession légitime. Cette formalité accomplie, le nouveau roi pourra épouser Anne, rentrée en Bretagne dès août 1498. C’est là que Louis viendra la rejoindre pour l’épouser le 9 janvier 1499 dans la chapelle du château des ducs de Bretagne à Nantes.

 

En octobre 1499 naîtra une première fille, Claude, puis en janvier 1503 un fils qui meurt à sa naiss- ance, puis en octobre 1510 c’est la naissance de Renée qui deviendra duchesse d’Este.

 

Mais entre temps, en 1505, Anne était revenue en Bretagne pour un grand Tro Breizh. C’est durant ce voyage qu’elle vint à Brest admirer le navire dont elle avait ordonné la construction en 1496, La Cord- elière, qui devait, sous les ordres de Hervé de Portzmoguer, affronter le vaisseau anglais Le Régent au large  de Brest en 1513 et connaître une fin tragique.

 

Mais si elle n’oublia jamais la Bretagne, Anne fut une admirable reine de France. Pendant que ses deux époux successifs guerroyaient en Italie, elle encourageait les lettres et les arts.

 

Bien entendu, à côté d’auteurs et d’artistes français et italiens, elle soutint Pierre le Baud, le premier grand historien du duché et aussi Jean Meschinot qui avait été au service de ses prédécesseurs les ducs de Bretagne depuis Jean V. Parmi les nombreux artistes qu’elle encouragea et soutint il y avait Michel Coulm, dit Michel Colombe originaire du Léon et qui devait sculpter la statuaire du tombeau de François II et de son épouse, aujourd’hui dans la cathédrale de Nantes.

 

Mais cette trop courte vie, si bien remplie, devait s’achever le 9 janvier 1514 au château de Blois.

 

Elle fut inhumée dans la basilique de Saint-Denis le 16 février suivant et, sur sa demande expresse, son cœur fut placé dans un reliquaire qui fut conservé au couvent des Carmes de Nantes où se trouvait les mausolées des ducs et duchesse de Bretagne. Ce cœur en or, hélas vide, se trouve aujourd’hui au musée Dobrée de Nantes qui l’a prêté au musée du château des ducs de Bretagne.

 

Avec ce décès, la Bretagne qui avait tant aimé sa duchesse, perdait celle qui l’avait aussi tellement aimée et qui fut le dernier rempart des libertés bretonnes.

Jean Cévaër

 

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